Les serveurs « Classics » en questions

C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes ? Les serveurs Classics gagnent en popularité et sont parfois à même d'attirer de nouveaux joueurs. C'est notamment le cas d'Old School RuneScape dont Jagex détaille les origines et les enjeux.

RuneScape 3

Si les MMO ont en principe vocation à évoluer dans le temps (au gré des patchs, mises à jour et extensions déployés au cours de l'exploitation du jeu), on constate néanmoins que les serveurs « Classics » gagnent manifestement en popularité auprès des joueurs. Les joueurs de MMO apprécient manifestement de retrouver la version originale de leur jeu de prédilection, tel qu'il était lors de son lancement il y a parfois des années - on l'a constaté récemment avec le serveur Nostalrius (ce serveur privé reposant sur la version originale de World of Warcraft qui accueillait 150 000 joueurs actifs avant que Blizzard ne le fasse fermer), on le constatait tout autant avec les serveurs « Classics » officiels d'EverQuest (relancé récemment par Daybreak Game) ou de Lineage II (même si les joueurs semblent un peu moins enclin à franchir le pas). Le studio Jagex tentait aussi une expérience similaire avec Old School RuneScape, une version « Classic » de son MMO historique RuneScape.
Et le développeur britannique a la bonne idée de dresser le bilan de cette expérience -- forcément positive et aussi pour en faire la promotion à l'heure où la fermeture de Nostalrius fait parler dans les médias, mais permettant néanmoins de mieux appréhender le phénomène.

Une expérimentation

RuneScape

On en retient notamment que l'ouverture du serveur Old School RuneScape résulte initialement d'une demande des joueurs -- quelque 500 000 d'entre eux se seraient mobilisés en ce sens. Pour autant, malgré ce nombre élevé, le studio Jagex s'interrogeait sur la pertinence d'un tel serveur, à plusieurs titres : d'abord du fait du coût technique et humain nécessaire à son exploitation, pour autant de ressources qui ne seraient pas affectées à l'exploitation de la « vraie version » du MMO, et ensuite pour le risque que pouvait représenter un tel serveur pour les serveurs officiels -- n'y avait-il pas un risque de disperser la communauté des joueurs, voire que les deux versions du MMO ne se parasitent mutuellement ?
Après réflexion, le développeur décide néanmoins de franchir le pas, à titre expérimental, considérant qu'Old School RuneScape pourrait être fermé en cas d'échec et les équipes rapidement réaffectées si nécessaire.

Des conséquences inattendues

Il s'avère que l'expérience est payante : cette version « Classic » de RuneScape est un succès commercial et trouve rapidement son public parallèlement à la version « normale » du MMO. Pourquoi ? Sans doute pour des raisons de nostalgie, mais pas uniquement puisqu'Old School RuneScape compte aujourd'hui davantage de joueurs que la version originale de RuneScape lors de son lancement (et aujourd'hui, les deux versions sont peu ou prou jeu égal en terme de joueurs).
S'il y a bien des anciens joueurs sur la version Old School, elle en a aussi attiré de nouveaux. Car selon le développeur, divers sondages et consultations ont montré que les joueurs de la version Old School appréciaient surtout l'ancien système de combat (modifié en 2012) car plus adapté au PvP, l'approche du grind ou encore le modèle économique. Le « vieux MMO » a su séduire les « jeunes joueurs » avec ses singularités.

Kara Meir

Le serveur Old School a néanmoins aussi suscité des réactions inattendues : les deux versions du MMO ont certes agrégé deux communautés de joueurs, mais promptes à s'opposer. Les uns se revendiquant comme les puristes de la licence, les autres comme les tenants du progressisme.
Plus surprenant encore, une division similaire est apparue au sein de l'équipe de développement : le petit groupe en charge de l'exploitation d'Old School RuneScape s'est progressivement coupé du reste du studio pour suivre ses propres schémas de développement. Le développeur s'est donc attelé à réorganiser ses équipes, incluant davantage de postes transverses travaillant à la fois sur les deux versions du MMO, au fur et à mesure que l'équipe d'Old School RuneScape prenait de l'ampleur (elle compte aujourd'hui cinq fois plus de membres qu'à l'ouverture du serveur en 2014).

Quand le vieux devient moderne

Et l'exemple d'Old School RuneScape est sans doute loin d'être anodin puisque le serveur représente aujourd'hui « une part majeure du business de Jagex », alors que la coexistence des deux versions du MMO permet « d'une part à RuneScape de continuer d'évoluer tout en offrant d'autre part aux traditionnalistes un espace accueillant ». Plus significatif encore, Old School RuneScape laisse une place significative aux affrontements entre joueurs (moins présents depuis quelques années dans la version moderne de RuneScape), permettant à Jagex de faire ses premiers pas en matière d'eSport et de diffusion de compétitions entre joueurs. Les « vieilles » mécaniques du MMO s'avèrent manifestement faire écho aux tendances les plus actuelles.

L'expérience d'Old School RuneScape n'est sans doute pas reproductible dans tous les MMO -- RuneScape est un titre particulier qui s'est toujours adressé à une frange de joueurs davantage en quête d'expériences de gameplay que d'évolutions technologiques et on sait certains développeurs très hostiles à ce type d'initiatives (Blizzard affirme par exemple que les joueurs peuvent être certes nostalgiques de la version « Vanilla » de World of Warcraft, mais qu'ils déchanteraient rapidement s'ils devaient y rejouer sérieusement). Pour autant, l'expérience de Jagex semble aussi être concluante et certains titres (sortis trop tôt ?) pourraient trouver une seconde jeunesse, alors que les joueurs et le marché ont drastiquement évolué au cours des dernières années.

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